Musée du Gévaudan, salle des Vertus

Mende, Lozère

 

Assistance et conseil auprès de la maitrise d’œuvre et d’ouvrage
Conservation restauration des peintures murales.

Assistance and advice to project and project management Conservation and restoration of mural paintings.

Date de la restauration : 2020-2022

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Fin du 17ème siècle, peinture à l’huile sur mortier de chaux
Inscrite au titre des Monuments Historiques (2012)

Historique

Cet espace exceptionnel appartient à une ancienne demeure dans laquelle se sont succédées plusieurs nobles familles du Gévaudan, parmi lesquelles les de Moré et les Brun de Montesquieu aux 17ème et 18ème siècles. La maison est achetée en 1683 par Gilbert de Moré, bourgeois de Serverette, et sa femme Jeanne Bonnefoy. Leur fils Gabriel de Moré l’aménagera ; il est entre autres Conseiller du Roi, juge de Serverette, maire de Mende en 1734. C’est certainement à l’occasion de son mariage avec Marguerite Boyer de Galion en 1692, qu’il commande les peintures murales. L’accès d’origine à cette pièce se faisait depuis la porte murée visible au fond de la salle.

Lors de la transformation du quartier en logements au cours du 20ème siècle, la salle a été mutilée et les peintures dégradées puis masquées sous un enduit. Cet espace devient… une cuisine ! C’est à l’occasion de travaux de rénovation en 1990 que l’on redécouvre et protège cet ensemble, avec le concours de la Conservation départementale et des Monuments historiques. La peinture est très abîmée et quasiment illisible. Les premières mesures de conservation sont réalisées par Godin et Borkowski de 1990 à 1993 puis Rigaud en 2014. Les résultats prometteurs incitent à rattacher cet espace au Musée du Gévaudan, dont les travaux ont lieu de 2020 à 2022.


Iconographie

La voûte en berceau est soulignée par une frise de feuilles d’acanthe. Les figures identifiées sont réalisées d’après Simon Vouet (1590-1649), peintre du Roi Louis XIII. Dans les années 1630-1640, son œuvre est diffusée par des estampes du peintre et graveur français Michel Dorigny.

Sur la voûte : les Vertus Justice, Force d’âme, Tempérance et Prudence. Les originaux ornaient le plafond de la chambre de la Reine Anne d’Autriche au château de Saint-Germain-en-Laye ; ils sont aujourd’hui au château de Versailles. Au cœur de la voûte, trois personnages féminins dont le mystère demeure, certainement des Vertus également.

En fond de salle, sur le tympan : Diane au repos, d’après un tableau de Vouet. En soubassements, des déesses romaines représentées sur fond de paysage dans un encadrement imitant le marbre. Dans les embrasures de fenêtres, des tableaux de petits paysages. Sur le manteau de cheminée : un paysage en médaillon surmonté du blason familial de la famille de Moré.

Assistance et conseil auprès de la maitrise d’œuvre et d’ouvrage

Une protection générale des décors par des facing a été réalisée au démarrage des travaux de réhabilitation du musée du Gévaudan. Ce facing était composé d’un papier Bolloré collé avec une méthylcellulose. Cette protection a permis aux lots du gros œuvre d’intervenir plus sereinement et en limitant les risques de dégradation des décors.

Une consolidation de la voûte par des coulis de chaux avait été envisagé et devait être mise en œuvre par le lot maçonnerie. Après la dépose de la couverture, l’expertise de l’extrados de la voute a permis de constater le bon état de l’appareillage en pierre ainsi que des joints de maçonnerie. Il a été décidé avec la maitrise d’œuvre de ne pas réaliser ces coulis de chaux. Une consolidation des enduits par l’intrados a été jugée suffisante, elle a été réalisée par notre atelier.

Notre assistance a également été sollicitée pour l’intégration la plus discrète mais néanmoins la plus efficace possible du système de climatisation. Celle-ci a été intégrée dans des caissons en Placoplatre de part et d’autre de la cheminée. Nous les avons intégré au décor général de la salle des vertus avec un badigeon ocre. Nous avons sensibilisé la maitrise d’œuvre et d’ouvrage au fait d’orienter le flux d’air climatisé vers le sol en évitant l’orientation directe vers les peintures murales.

Nous avons guidé le lot peinture dans le choix de la couleur pour les huisseries et les grilles de ventilation de façon à se fondre dans la couleur du badigeon.

Enfin nous avons préconisé un éclairage des peintures murales le plus doux et le plus diffus possible en évitant les halos lumineux qui pourraient venir perturber la lecture des décors.

Tous les enduits sur les élévations ont été purgés.

 

Conservation restauration des peintures murales

Lors des interventions de 1990-1993 et 2014, des sondages sommaires avaient été réalisé sur l’élévation sud. Des sondages complémentaires ont été nécessaires au préalable à notre intervention. Ces sondages ont permis de constater l‘absence d’un décor contemporain et en prolongement du décor du XVII° siècle de la voute. Les murs, sous la peinture murale, ont donc été purgé et un enduit en dégrossi a été réalisé par le lot maçonnerie.

Les sondages ont montré que, sous 5 couches de badigeons ou peinture, un enduit différent de l’enduit XVII° venait en recouvrement de la fresque.

Cet enduit couvrait la totalité des élévations, la continuité du décor XVII° a donc disparu. Ci-dessous, le sondage réalisé montre bien les différentes strates.

Si, dans l’esprit général, nous avons repris les préconisations des 2 rapports précédents, nous avons adapté certaines interventions aux expériences et aux pratiques de notre atelier. Ci-dessous, nous en détaillons la mise en œuvre.

Refixage de la couche picturale

Le refixage de la couche picturale est réalisé au préalable à toutes interventions de conservation-restauration.

Lors de l’intervention de 1990-1993, un refixage général a été réalisé au Paraloïd B72 à 10%. Nous avons observé 2 inconvénients à l’utilisation de cette résine : une tendance à faire briller la surface et une insuffisance du refixage : lorsque nous avons appliqué le facing général, nous avons observé un manque d’adhésion entre la couche picturale et les enduits. Nous avons testé le Primal E330 à 5% dans de l’eau. Les résultats ont montré une stabilité de la couche picturale à l’arrachement parfaite (lorsque l’on retire le facing) .

Mise en œuvre :

  • L’adhésif est appliqué à la seringue ou au pinceau en ayant au préalable protégé la surface avec un papier Bolloré collé avec une méthylcellulose dans les zones où les soulèvements menacent de tomber.

  • Après un séchage d’environ une heure, la mise en contact de la couche picturale et du support peut-être améliorée en passant un fer chaud (65°) sur les soulèvements ou bien en « massant » simplement la surface avec un coton au travers un papier Mélinex.

  • Après le refixage les facing sont retirés par humidification.

Consolidation des enduits :

Les enduits ont été consolidés par des injections de coulis de chaux (PLM-A) mais l’essentiel avait été fait lors des précédentes interventions.

Elimination des éléments postérieurs (enduits récents, cheminée.)

Les purges ont été réalisées par le lot maçonnerie après les sondages décris ci-dessus. Tous les éléments non contemporains des décors du XVII° ont été éliminés. Le dégrossi pour la reprise des enduits ont été par le lot maçonnerie, nous avons pris en charge l’enduit de finition, sable/chaux, 1 part de chaux / 3 parts de sable granulométrie 0,2.

Nettoyage de la surface

Nettoyage des surfaces peintes au coton humide. Le nettoyage a été réalisé en même temps que le nettoyage des mastics au moment du comblement des lacunes. La surface avait été largement nettoyée lors des précédentes interventions. De l’eau pure a été suffisante pour obtenir un nettoyage complet des polychromies.

Réintégration des lacunes et reprise des bouchages :
Les lacunes ont été, dans un premier temps, comblées avec un enduit sable de granulométrie proche de l’enduit original et chaux. Une finition au Toupret à été appliquée afin de retrouver l’aspect final de la surface originale. Les retouches ont été réalisées uniquement à l’aquarelle pour éviter l’addition de matériaux différents et conserver une bonne réversibilité et stabilité. Le traitement a trattegio ou petits points a permis de retrouver la transparence des glacis voulu par l’artiste.

Badigeons sur les parties réenduites :
Les élévations, le jambage et la partie inférieure de la hôte de la cheminée, ainsi que les 2 passages d’accès à la salle des vertus ont été badigeonné en harmonie avec la dominante ocre du décor. Suffisamment lumineux pour ne pas « étouffer » la peinture murale et neutre pour la mettre en valeur.

Les retouches et réintégrations des lacunes ont été réalisées principalement en fonction de l’existant. Les photos des peintures de Simon Vouet ont permis de comprendre certaines formes ou dessins. Nous n’avons pas cherché à reconstituer les manques même si l’apport iconographique de Vouet l’aurait rendu possible. Les grands manques ont été atténués par une couleur ocre en harmonie avec l’original.

Au cœur de la voûte, trois personnages féminins dont le mystère demeure, certainement des Vertus également.

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